Source revue « LE SOUVENIR FRANÇAIS » N° 469 de janvier 2008.
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Aubert
Frère naquit à Gévillers en 1881, dernier d'une famille de 11 enfants. Il fut élevé dans une région qui souffrit beaucoup des
invasions allemandes.
A
18 ans, il est reçu brillamment à Saint-Cyr (4ème sur 500) et
les qualités du Général Frère s'imposent déjà
: son beau physique, sa prestance, ses yeux bleus exprimant tout à la fois
franchise, volonté mais aussi bonté. A sa sortie de Saint-Cyr, il sert d'abord
au 2ème Tirailleur Algérien
dont les unités sont dispersées dans le Sud Oranais.
De
1902 à 1912, le lieutenant Frère sert aux confins algéro-marocains. Lyautey arrive en septembre 1903 à
Aïn-Sefra et applique sa politique : réduire l'occupation dispersée, mettre les
populations en confiance, assurer leur sécurité et provoquer leurs ralliements.
Pendant
10 ans, le lieutenant Frère, d'abord à la tête d'une section de tirailleurs
puis de
groupes francs et des forces de police franco-marocaines parcourt le djebel, le
désert, la montagne.
Déjà, il sera marqué par l'importance de l'observation et du renseignement. Grâce à une
étonnante vigueur physique, il sera à la tête des troupes de reconnaissance et de combats. Les opérations de Bou
Denib (Sud Oranais) lui valurent la Légion d'honneur.
En
1911-1912, il participe à la pacification du Maroc, au Nord et à l'Ouest
d'Oujda. Fin 1912, il rentre en France, devient capitaine à la suite d'une
proposition exceptionnelle, méritée au
combat de Debdou en avril 1912.
Ces
dix ans d'Afrique auront mûri son esprit et agrandit encore sa foi religieuse « Quand on a vécu le silence du désert, cet
indescriptible silence, ces nuits à la belle étoile,
il est impossible de ne pas croire en Dieu ».
Grâce
à Lyautey, il rejoint à Cambrai le 1er Régiment d'Infanterie qui sera son « cher » régiment. Il
commandera la 8ème Compagnie
en octobre 1913. En mars 1914, le capitaine Frère se marie et Madame Frère partagera
la vie de son mari « pour le meilleur mais aussi pour le pire » !
Le
22 août 1914, il est blessé au cou par balle. A peine guéri, il reprend le commandement de sa Compagnie en
Champagne. Début 1915, il prend le commandement d'un bataillon du 84ème
R.I. : Champagne, Woëvre et, en août 1915, nommé chef de bataillon, il commande le 2ème bataillon du 1er R.I. Il reçoit sa 4ème citation près de Berry au Bac.
En
mars 1916, le commandant Frère conduit son bataillon à Verdun et, en août , il participe avec lui à la
bataille de la Somme.
Le
24 août, après l'attaque de Maurepas, il est promu Officier de la Légion d'honneur. En mars 1917, il
quitte son bataillon pour être nommé Chef de Corps du 6ème Bataillon de Chasseurs où il saura se faire
aimer, laissant à chacun une grande initiative et faisant appel à
l'intelligence et au cœur. Son bataillon participe à l'offensive Nivelle de
1917. En août et septembre, les combats du
Chemin des Dames et l'attaque de Malmaison valent au 6ème Bataillon deux citations et à son chef, une deuxième blessure à la cuisse, puis le
commandant Frère conduit son bataillon en Alsace, en Picardie. Le 21
avril 1918, il est très grièvement blessé
par un bombardement aérien.
Avec
une volonté extraordinaire, il arrive à remarcher et, appuyé sur une canne, il viendra dire adieu à son bataillon en août 1918.
Promu
lieutenant-colonel, fait Commandeur de la Légion d'Honneur, il sera muté à l'État-major de Gouraud et pourra ainsi
participer à l'entrée triomphale à Strasbourg le 22 novembre 1918.
De
1920 à 1925, il commande à Cambrai son cher 1er R.I. (il le retrouvera plus tard dans la résistance).
En
1925, il commande l'École d'Application des Chars à Versailles qu'il quitte en 1931 pour prendre le commandement de l'École de
Saint-Cyr jusqu'en 1935 avec le grade de Général.
A
la déclaration de guerre, en 1939, le général Frère commande le 8ème Corps à Strasbourg avec le secteur fortifié des Vosges. Il participe à
l'opération « Sarre » destinée à manifester
la solidarité avec la Pologne.
Le
17 mai, le général Georges confie au général Frère la VIIème Armée formée d'éléments venus de Flandres et complétée d'unités nouvelles en cours de
formation. Leur mission : tenir le front de
l'Aisne et de la Somme entre le Chemin des Dames, le canal de l'Ailette et la vallée de la Somme, à
l'Est d'Amiens. Son armée, formée de douze
divisions, colmate la brèche ouverte sur Paris et reçoit, à partir du 6 juin, l'attaque des divisions allemandes. Frère lutte
sur la Somme puis sur l'Oise, mais doit reculer sous la poussée des
divisions de Panzer.
Ayant
assuré la retraite de ses forces, le général Frère se retrouve en zone Sud
après l'armistice,
ne cachant pas sa volonté de préparer la revanche. Il prend des contacts avec le 2ème Bureau et au sein de l'armée de l'armistice
(100 000 hommes en métropole), le général Frère est nommé Gouverneur de Lyon et
commandant la 14ème division,
puis en juillet 1941, commandant à Royat du
deuxième groupe de divisions militaires, soit la moitié de l'Armée d'Armistice.
Partout,
il affirme sa foi dans le relèvement de la France et la défaite de l'Allemagne. Le général Frère
participe à l'Organisation militaire clandestine. Lors de l'invasion de la zone libre,
sera constitué l'ORA (Organisation de Résistance de l'Armée) et le général Frère
sera à la tête de cette Organisation. Il participe à toutes les réunions clandestines. Sa
haute stature est surveillée et sa vie menacée mais il refuse de partir pour Londres
pensant que son devoir est d'être en France.
Le 13 juin 1943, le
général et Madame Frère sont arrêtés par la Gestapo. Suivront les arrestations
des généraux Delestraint, Olleris et Gilliot.
Les interrogatoires se
poursuivent sans relâche et sans ménagements. Madame Frère sera déportée en juillet 1944 à Ravensbrück (elle
en reviendra). Le général Frère sera d'abord mis au secret à Fresnes pendant
neuf mois puis le valeureux soldat sera déporté au camp
d'extermination du Struthof le 5 mai, en même temps que les généraux Olleris, Grandsart et Gilliot.
Le général Verneau qui lui
succéda à la tête de l'ORA sera lui aussi déporté et mourra
le 15 septembre 1944.
La dernière joie du général Frère sera
d'apprendre le débarquement en Normandie le 6 juin 1944. Il mourra le 13 juin,
terrassé par une angine diphtérique et la dysenterie.
Un jeune prêtre français,
déporté, l'assistera dans ses derniers moments et déclarera : « le Général Frère est un Saint. La seule chose
que j'ai pu faire pour lui, c'est de l'embrasser
».
Aujourd'hui, nous pouvons
lire sur la plaque située à Saint-Louis des Invalides, Cathédrale
des Soldats, à la mémoire du général Frère : « ses cendres furent dispersées au vent d'Alsace ».
Face à cette plaque, une autre précise : « 58 Officiers de la promotion FRÈRE sont morts pour la France en Indochine et en Algérie ».
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Le général Frère : 3 blessures, 10 Citations, Grand Croix de la
Légion d'honneur.